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A Marseille, le festival Actoral dans les peaux d’un monde en mutation

A Marseille, le festival Actoral tient le cap, contre vents et marées. Et ce n’était pas gagné, à l’issue d’une année qui a bien failli lui être fatale : la manifestation créée par l’auteur et metteur en scène Hubert Colas en l’an 2000 a dû ces derniers mois affronter bien des tempêtes, et la perte de son lieu emblématique, Montévidéo, niché dans une impasse du 6e arrondissement de la cité phocéenne, lieu qui a servi pendant toutes ces années de foyer d’incubation à de nombreux talents.
Actoral a survécu, notamment grâce à ses réseaux internationaux, et propose jusqu’au 12 octobre une programmation interdisciplinaire toujours aussi excitante, à la croisée du théâtre, de la performance, de la danse, de la musique, des arts visuels et de la littérature. Le point commun ? Il s’agit toujours d’écritures fortes, d’artistes qui inventent leur propre langage, quel que soit le domaine dans lequel ils opèrent. Actoral a son public, ardent et fidèle, dans une ville où la création scénique ultra-contemporaine est peu représentée : un public qui guette les découvertes – nombreuses – et les artistes plus confirmés, à l’image de Gisèle Vienne, qui présente les 2 et 3 octobre son spectacle Extra Life, avec Adèle Haenel.
Le début du festival a vu ainsi se succéder deux des créateurs les plus passionnants du moment, le plasticien et metteur en scène Théo Mercier et la metteuse en scène et performeuse Rébecca Chaillon. En primeur avant le Festival d’Automne à Paris (où il est programmé du 21 novembre au 8 décembre à La Villette), le premier propose une expérience singulière, qui confirme sa capacité à faire bouger les lignes du spectacle vivant.
Dans Skinless, le public est d’abord accueilli par une étrange créature, qui semble être le gardien d’une muraille faite de canettes de métal compressées, une matière avec laquelle il se confond, qui semble l’avoir absorbé, s’être hybridée avec lui, avec sa peau aux reflets d’argent sombre. Vient-il du passé dans un monde du futur, ou du futur dans notre présent ? Il ouvre, dans tous les cas, les portes d’un étrange rituel, qui exerce son pouvoir de fascination jusqu’au bout, en conduisant le public vers les bas-fonds dont il est le veilleur grimaçant et inquiétant.
Le public découvre alors un énorme ring fait de balles de déchets en carton comprimé. A l’intérieur se niche un monde souterrain, creusé de galeries d’où émergent peu à peu deux autres créatures tout aussi mystérieuses, le corps et le visage intégralement recouverts de combinaisons en latex couleur chair. Comme deux nouveau-nés propulsés dans la lumière, ils apparaissent, hésitants et fragiles, sous les néons crus qui évoquent une expérience de laboratoire. Ils ont l’inquiétante étrangeté de la marionnette, avec cette double peau qui gomme toute expression, toute singularité.
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